La famille Peugeot vient de faire un choix symbolique chez Stellantis : privilégier la continuité en réélisant Robert Peugeot à la vice-présidence du conseil d’administration. Ce geste traduit une confiance renouvelée envers la stratégie actuelle. Il révèle aussi certaines tensions internes. Plongeons dans les coulisses de cette décision et ses enjeux pour le géant automobile.
Un vote pour la stabilité au sein du conseil de Stellantis
Robert Peugeot, figure historique du groupe familial, décroche un nouveau mandat en tant que vice-président de Stellantis jusqu’en 2028. À 75 ans, celui qui siège au conseil d’administration depuis la fusion avec Fiat Chrysler reste ainsi le visage institutionnel de la lignée Peugeot dans le fleuron franco-italo-américain. Le maintien de Robert incarne un message fort : il s’agit de ne rien bouleverser, au moins jusqu’à la prochaine décennie.
Derrière ce choix, les trois entités qui défendent les intérêts familiaux ont voté d’une seule voix. Il s’agit du holding principal Établissements Peugeot Frères, de Peugeot Invest (la branche cotée en Bourse) et d’autres unités familiales. Cette unanimité n’empêche pourtant pas quelques débats stratégiques autour de la table. Voilà un signe d’un clan où tradition et ambition cherchent encore leurs marques.
Une rivalité discrète mais tenace parmi les héritiers
La candidature de Xavier Peugeot, cousin de Robert et actuel responsable de la marque DS, a animé les discussions internes. Plus jeune, plus offensif, Xavier voulait renforcer la présence de la famille dans les organes de décision de Stellantis. Toutefois, le camp du statu quo l’a emporté, offrant à Robert un ultime mandat avant un éventuel passage de témoin après 2028.
L’opposition entre ces deux profils symbolise une vieille dualité interne. Une partie souhaite conserver un rôle plus feutré, privilégiant la gestion patrimoniale et la stabilité financière. L’autre milite pour une influence accrue et active dans le pilotage industriel du groupe. Ce débat remonte à plusieurs décennies, notamment après la disparition de Pierre Peugeot, figure tutélaire de la dynastie.
Des investissements diversifiés loin du cœur automobile
Sous la houlette de Robert Peugeot, les fonds du groupe familial ont pris un chemin de diversification : placements financiers, participations variées et développement d’actifs hors secteur automobile. Cette politique prudente laisse une marge de manœuvre confortable aux dirigeants actuels du constructeur.
Xavier Peugeot, de son côté, ambitionne de recentrer le capital familial vers l’industrie automobile pure. Son objectif affiché ? Favoriser une remontée en puissance de la branche Peugeot au sein du conseil d’administration et peser davantage sur les décisions stratégiques prises par Stellantis. Mais ce projet attendra, du fait du statu quo imposé par l’accord de fusion jusqu’à 2028.
Quelles perspectives pour la relève familiale ?
Le nom Peugeot pourrait-il retrouver la place dominante qu’il occupait autrefois ? La réponse dépend désormais de la nouvelle génération, incarnée notamment par Edouard Peugeot, fils de Robert et récent patron de Peugeot Invest. D’ici les prochaines années, la configuration actionnariale pourrait évoluer si la famille parvient à augmenter sa part à 8 % – une hypothèse déjà évoquée par certains héritiers ambitieux.
Autre option stratégique : tenter d’obtenir un second siège au conseil de surveillance, démarche probablement réalisable seulement après l’expiration du statu quo en 2028. Ce scénario offrirait alors à la famille Peugeot une double voix dans le cockpit de Stellantis, renforçant sa légitimité historique face aux actionnaires italiens d’Exor, toujours premiers au classement.
Partage du pouvoir : forces en présence et poids des actionnaires
Stellantis présente aujourd’hui un actionnariat éclaté, reflet de son ADN international. Au dernier pointage, Exor (famille Agnelli) détient près de 15 % du capital, suivi par la famille Peugeot (7,6 %), puis l’État français via Bpifrance, le groupe chinois Dong Feng Motors, sans oublier les représentants des salariés. Ce paysage pluriel rend toute prise de contrôle majoritaire peu probable à court terme.
Ainsi, Robert Peugeot occupe le poste de vice-président aux côtés de John Elkann (président), chef de file des Agnelli, tandis que le management opérationnel est piloté en grande partie depuis les États-Unis. Quelques proches observent que la perte d’influence perceptible des Français au sein du groupe nourrit certains regrets. Pourtant, le maintien de Robert vise justement à préserver un équilibre subtil.
Entre transmissions familiales et ambitions industrielles
Ce qui se joue actuellement dépasse la simple répartition des fauteuils. Chez Peugeot comme ailleurs, la transition générationnelle soulève des questions existentielles : faut-il privilégier la préservation du patrimoine ou raviver l’esprit conquérant qui a fait la renommée de la marque ? Certains membres regrettent que la famille ne s’implique plus aussi directement dans les grandes orientations de l’entreprise.
D’aucuns pointent également la montée en puissance de branches internationales, mettant doucement à l’écart une influence française jadis incontournable. Toutefois, pour le moment, la stabilité reste la priorité familiale, gage de sécurité pour les actionnaires et de sérénité pour les marchés financiers.
- Robert Peugeot maintenu à la vice-présidence du conseil d’administration de Stellantis jusqu’en 2028
- 7,6 % du capital détenu par la famille Peugeot, deuxième actionnaire derrière Exor
- Des tensions entre conservateurs et partisans d’un retour à un leadership actif
- Période de statu quo acté lors de la fusion PSA-FCA, valable jusqu’à 2028
- Ambitions possibles d’élargissement de la représentation Peugeot au conseil après cette date
| Actionnaire | % du capital (2025) | Rôle |
|---|---|---|
| Famille Agnelli (Exor) | 14,9 % | Présidence, premier actionnaire |
| Famille Peugeot | 7,6 % | Vice-présidence, deuxième actionnaire |
| Bpifrance | 6,4 % | Troisième actionnaire |
| Dong Feng Motors | 1,6 % | Partenaire sino-européen |
| Salariés Stellantis | 1,8 % | Représentation interne |
Enjeux futurs pour la dynastie Peugeot chez Stellantis
La voie choisie par la famille Peugeot s’apparente à une longue route peu accidentée, favorisant l’équilibre et le dialogue entre générations. Dans quelques années, la question du relais devrait revenir au centre de la table, posant encore l’éternel dilemme entre prudence patrimoniale et audace industrielle. Les choix opérés aujourd’hui façonneront durablement l’influence du lion dans le grand échiquier automobile mondial.
Les regards se tourneront bientôt vers la nouvelle génération : osera-t-elle briser la routine ou préférera-t-elle poursuivre dans la voie ouverte par ses aînés ? Une interrogation qui promet de rester d’actualité… aussi longtemps que le mythe Peugeot continuera de rouler sur nos routes.















